Né à Neuchâtel le 20 septembre 1930 d’un père chaux-de-fonnier exilé en Chine et d’une mère russe, Edgar Tripet passe son enfance à Shanghai jusqu’en 1938, l’année où son père se suicide. Confié à ses grands-parents paternels par une mère qui ne lui a jamais prêté beaucoup d’attention, l’enfant fait ses classes à la Chaux-de-Fonds. Au Gymnase, il est marqué par la personnalité de Jean-Paul Zimmermann, son professeur de littérature. En 1949, baccalauréat en poche, il part faire des études à Paris avec son amie, Lison Schelling, qu’il épousera en 1951. Après un début en sciences politiques, il opte pour l’étude des lettres à la Sorbonne. De retour en Suisse, il partage sa vie entre l’enseignement de l’histoire, la politique, les engagements culturels, l’écriture d’un roman (Où cela était…, L’Âge d’Homme, 1972), puis la direction du Gymnase cantonal de La Chaux-de-Fonds de 1976 à 1993. Edgard Tripet meurt à Neuchâtel le 31 décembre 2019, laissant derrière lui plusieurs œuvres inédites.
Claude-Éric Hippenmeyer et Pier-Angelo Vay, anciens élèves puis collègues d’Edgar Tripet, après avoir partagé un long compagnonnage avec lui, ont pris l’initiative de ces trois publications à la fois pour honorer un maître à penser et faire vivre une réflexion plus indispensable et tonifiante que jamais.
Ils savent gré à Lison et à Diane Tripet de les avoir encouragés tout au long de leur travail et d’en avoir généreusement soutenu l’édition.
Les trois livres sont ici téléchargeables et sont en vente chacun dans les librairies au prix de CHF 20.- le volume.
Identité et culture, Exils, Polyptyque

Edgar Tripet n’a cessé de s’engager sur le front de la vie culturelle suisse : Pro Helvetia, Commission suisse pour le cinéma, Commission suisse pour l’UNESCO, Journées européennes des Écoles, Club 44, sans oublier les instances politiques communale et can- tonale, et son enseignement.On trouvera dans ce volume quelques-uns des textes les plus significatifs, en particulier ceux sur le paradoxe suisse: comment font trois cultures, quatre langues, vingt-six gouvernements de toutes les orientations politiques, pour cohabiter dans un si petit territoire sans se neutraliser ou s’entre-détruire. Alors que la démocratie recule partout dans le monde, que les forces de repli l’emportent sur l’esprit d’ouverture et que la Suisse s’interroge avec une nouvelle acuité sur ses rapports avec l’Europe – voire sur sa neutralité légendaire – il est bon de découvrir ou redécouvrir la pensée lucide et humaniste d’Edgar Tripet. On y lira également quelques lettres savoureuses où l’on croise, entre autres, un Conseiller fédéral, un grand industriel de La Chaux-de-Fonds, les mères juives de Babylone, Salomé, Phèdre, Lénine au Cercle ouvrier et, bien sûr, le diable.

C’est le récit de trois hommes qui dialoguent à mi-voix. Au fil de leur discussion se dessine le bilan d’une vie, d’une génération, d’un siècle. Cette histoire est aussi la nôtre: qu’avons-nous fait de nos utopies, de nos rêves ? Comment en sommes-nous arrivés là? Par quel retournement, à la suite de quels renoncements ou de quelles compromissions, avons-nous pu devenir complices ( et souvent victimes) de tant d’illusions idéologiques, politiques ou religieuses ? Exils répond lucidement à ces questions et interroge sur ce qui reste à nos âmes en exil dans nos démocraties privées de boussole.

Celui qui parle – et se parle – est un «vieil homme» qui, à plusieurs reprises, a vu la mort de près. Il s’impose un voyage intérieur au fil de la mémoire. Son passé ressurgit, aléatoire, tantôt flou, tantôt plus réel que le présent. Y défilent les visages et les regards de toute une vie, certains à peine entrevus, d’autres lourds et obsédants, accompagnés de l’éventail des senti- ments qui restent à jamais agglutinés à leur image. Et à leurs interrogations lancinantes (pourquoi la vie plutôt que rien, pourquoi la mort et qui est-elle?), ni Dieu ni Diable ni per- sonne, pas même les philosophes, ne semblent répondre. Si rien n’est avéré, reste pourtant cette inscription, mystérieuse et nostalgique, que lisent sur une stèle les bergers de Nicolas Poussin : Et in Arcadia ego – moi aussi j’ai vécu en Arcadie, ce pays des délices…
